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Fouilles : Nouvelles découvertes sous Saint-Jacques

Depuis le 15 juin, des fouilles archéologiques explorent une parcelle de l’ancien hôpital Saint-Jacques. Alors que le chantier touche à sa fin, focus sur les découvertes qui y ont été faites.

C’est le service municipal d’archéologie de la Ville de Besançon qui effectue ces fouilles préventives.

La présence de mosaïques avait été signalée sous l’hôpital, nous pensions trouver de l’habitat antique”, explique Marie-Laure Bassi, Directrice du Patrimoine Historique de la Ville.

Mais c’est tout autre chose qui s’est laissé découvrir au fil des coups de pelle et de pioche.

Amphores espagnoles

A quinze jours du terme de la période de fouilles, la vision du site est plus complète pour les archéologues, et les structures mises au jour ne laissent guère de doutes : l’endroit avait une fonction logistique, c’était un espace de stockage, formé de plusieurs entrepôts, pour abriter les cargaisons arrivant par voie fluviale.

La proximité immédiate du Doubs, et les objets retrouvés sur place, confirment cette hypothèse. Sont en effet sortis de terre diverses monnaies antiques, des stylets de métal pour écrire sur des tablettes en argile, mais surtout, un très grand nombre d’amphores, dont certaines espagnoles qui contenaient de l’huile d’olive.

Leur provenance a été déterminée par leur forme, et leur présence prouve à quel point le commerce était dynamique et international à Besançon, précise Marie-Laure Bassi, qui se réjouit des informations précieuses que ces vestiges apportent sur la Besançon d’alors.

Marécages

301164654_1301159933752863_3924332613842765113_nL’endroit était par ailleurs à l’époque une zone marécageuse, et là encore, les constructions mises au jour témoignent des difficultés induites par la présence de l’eau.

Outre les murs des entrepôts, datés entre le 1er et le 3ème siècle après JC, on trouve sur site un large caniveau du 19ème siècle qui le traverse pratiquement de part en part et termine sa course dans un ancien lavoir, dont l’existence était connue et qui a fonctionné “jusque dans les années 60”.

ChamarsXVIIIeArchivesdepDoubsLe tracé du caniveau reprend celui d’un ancien collecteur du 17ème siècle, lequel suivait le tracé d’un mur antique assurant la même fonction. Juste derrière, se trouvait un ancien bras du Doubs, comblé depuis, mais connu des archéologues via divers plans anciens de Chamars.

Etendue des fouilles

La zone actuellement fouillée est à la fois vaste et restreinte. Elle couvre un périmètre non négligeable et a permis de sortir de terre de nombreux artéfacts intéressants, dont un rare mortier de cuisine antique intact. Mais ses limitations frustrent aussi certains archéologues. 

301643734_5336009003161468_133575825436085066_nIl s’agit de fouilles préventives, obligatoires dans le cadre d’un projet de construction. De par leur nature, elles se limitent donc à l’endroit qui sera impacté par le futur bâtiment (la Grande Bibliothèque). Au Nord, elles se heurtent également à des consignes de sécurité, ne permettant pas de s’approcher outre mesure d’un bâtiment historique de l’ancien hôpital Saint-Jacques, lequel est conservé dans le projet immobilier puisque datant du XVIIè siècle.

La limitation vient enfin du sous-sol : sous les vestiges, se trouve une nappe phréatique. L’eau visible sur la photographie ci-dessus n’est pas un reste de pluie, mais les eaux de cette nappe qui remontent et gênent le travail des chercheurs.

Malgré tout, les belles découvertes faites sur place compensent ces désagréments, de ce que l’on entend sur place.

Domus romaine

302083972_396135795934269_7423140463075111800_nA l’extrémité Nord de la parcelle, justement, une mosaïque blanche, sans motifs, a été mise au jour. Elle signale sans conteste la présence d’une domus, demeure aristocratique romaine, à cet endroit. Mais impossible d’en voir davantage, il faudrait creuser plus au Nord.

Fait intéressant, cette mosaïque n’est compatible avec aucun des murs que nous avons exhumés. La domus était donc antérieure aux entrepôts et a été détruite pour permettre leur construction. Cela témoigne d’un ré-aménagement de ce quartier antérieur au 1er siècle après JC”, s’enthousiasme Marie-Laure Bassi.

La photographie ci-dessus montre ce fragment. Le tuyau qui le surmonte date des années 1950, à l’époque où le patrimoine n’était pas protégé lors de tels aménagements…

Destruction

Si les objets découverts seront préservés, les murs et autres éléments de constructions finiront “à la déchetterie”. Tout sera détruit, car il faut laisser la place aux fondations du futur bâtiment, et que la récupération de tels vestiges serait complexe et coûteuse.

302390132_2227764120716908_39066269048056374_nSeul un mur tout au Sud, avec ses trois renforts, est intouchable : il fait partie des fortifications de Vauban et est, à ce titre, protégé. On ne sait encore de quelle manière il sera intégré à la Bibliothèque, ni s’ il sera mis en valeur. Ce qui est certain en revanche, c’est qu’il a forcé l’architecte du projet à revoir sa copie, car c’est justement à son emplacement qu’il voulait édifier une cage d’ascenseur.

Ce mur se poursuit sous terre, des abords du commissariat jusqu’au Petit Chamars. Avant d’être arasé, il était haut de 3 mètres supplémentaires, et ses fondations se situent actuellement 4 mètres sous le niveau du sol. Elles reposent sur un lit de pieux en bois, marécages obligent.

Post-fouille

Quant aux objets déterrés, ils sont inventoriés avec la plus grande précision, mis en sacs, et seront plus tard nettoyés puis étudiés. C’est ce travail de fourmi, dit de post-fouille, qui occupe le plus les archéologues puisqu’il les occupera de 6 à 9 mois, là où ils n’auront passé “que” 3 mois sur le terrain.

302623551_562372118910011_8161330296490878536_nAdrien Saggese, céramologue, nous présente les trouvailles du jour. Un fragment de verre, et des morceaux de céramique qu’il identifie instantanément comme provenant pour les uns d’une amphore, pour les autres d’une cruche. Les céramiques représentent 97% de ce qui est sorti de terre, ajoute-t-il.

Il nous montre de larges tuiles antiques retournées, qui viennent d’être mises au jour, sans que les archéologues ne sachent pour l’heure actuelle si elles recouvraient un bâtiment ou une canalisation. “On en saura plus dans les jours à venir”, précise-t-il.

302313918_509048494378267_1050014103180680252_nDiverses fosses, partiellement détruites, ont aussi été découvertes. De potentiels collecteurs d’eau, une hypothèse en cours de vérification par les archéologues qui “descendent plus bas” pour s’en assurer. De l’index, Adrien nous désigne une structure “en alcove” qui servait à drainer le trop plein d’eau du terrain. “Il y avait un fossé dans son axe, qui fonctionnait encore jusqu’à ce qu’on le détruise hier. Il évacuait les eaux en direction de Chamars” (et donc, vers l’ancien bras du Doubs).

Accès public le 3 septembre

Si le sujet vous intéresse, sachez que la Ville organise une grande journée de Portes Ouvertes du chantier, ce samedi 3 septembre de 14h à 18h. Sur place, les archéologues vous présenteront leurs dernières découvertes, et vous pourrez contempler des images inédites des éléments sortis de terre.

Rendez-vous avenue du 8 mai 1945, devant les grilles du site. Prévoyez des chaussures fermées et confortables, que vous ne craignez pas de salir.

Crédits photos : Orianne VATIN ; Archives Départementales du Doubs

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